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Samedi dernier aux Près-de-Vaux, un différend entre voisins a pris de plus amples proportions. Chez l’un des protagonistes, armes à feu, coutelleries et munitions ont été retrouvées en grand nombre. L’attirail était complété par des documents dédiés au IIIe Reich, un intérêt pour les dictatures marqué jusque dans la chair de cet homme de vingt-huit ans… Lequel arbore différents tatouages, certains ayant été décrits comme rendant hommage au régime de Mussolini. C’est que Philippe T. n’est pas un néophyte, ayant traversé toutes les sphères néonazies du secteur mais aussi à l’international. Rôdé au combat de rue et aux théâtres militaires, il a été condamné à de multiples reprises pour des faits de violence.

« Je suis passionné d’histoire »
Dans la soirée du 13 juillet dernier, une altercation oppose deux résidents d’un immeuble. Sur fond de musique forte, d’alcoolisation massive et d’embrouilles larvées, des coups sont échangés. Philippe T. revient à la charge, cette fois muni d’un pistolet ; Appelée sur place, la police découvre de la littérature néonazie et « une véritable armurerie », dixit le président du tribunal, comprenant, entre autres, un fusil, des poignards ou encore plus de 2 500 munitions. « Je suis passionné d’histoire » brocardera le prévenu, assurant avoir « rompu avec le milieu » et que l’objet décrit par le plaignant était une « simple poignée de porte ». Il en sera quitte pour un total de douze mois ferme sans mandat de dépôt, lors d’un procès par ailleurs relaté par l’Est Républicain.

Porteur de cinq mentions avant cet ultime jugement, son casier judiciaire relate diverses affaires de violences jusqu’en 2021. Une source proche du dossier affirme que les forces de l’ordre furent depuis déjà dépêchées au domicile de Philippe T., pour des faits similaires, à l’été 2023. « Lors de cette intervention, la constitution d’un arsenal et l’appartenance aux mouvances extrémistes avaient été soulignées. Vu le cursus du type et sa propension à déraper, c’était une question de temps avant qu’il ne refasse parler de lui. Il est suivi à cause de sa dangerosité, c’est une bombe qui peut péter à tout moment et sur n’importe qui ! » nous confiait-on. Car derrière ce banal conflit qui a dégénéré, se dresse un parcours brodé d’engagements et d’exactions radicales.

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Illustration de Philippe T., en 2017. Sur le front du Donbass, un homme, cagoulé, porte un étendard de la « Misanthropic Division » d’une main et exécute un salut fasciste de l’autre – capture d’écran.

Un activiste d’extrême-droite, passé par le Donbass
Philippe T. fait ses premières armes auprès du « Front Comtois », un groupuscule identitaire régional condamné en 2011 pour « provocation à la haine raciale ». Il est identifié au sein d’un cortège lors de l’édition 2012 du « C9M », une référence néofasciste fréquentée par la relève locale. Néanmoins la maison-mère se délite au début des années 2010, entraînant la formation de factions concurrentes comme les « Werwolf Sequania » à Besançon ; s’ensuit une période de véritable terreur brune, durant les années 2012-2013. Jusqu’en 2015, l’adolescent s’illustre dans ces cercles réunis au « Bunker », un bar nationaliste clandestin aménagé dans une cave de la famille C. à Bregille et qui servait ponctuellement de QG officieux pour les campagnes lepénistes.

Il rejoint ensuite le front du Donbass, opérant dans la division « Azov » et la « Misanthropic Division » courant 2017. À son retour en France, il est l’objet d’une enquête infructueuse, à la recherche d’armes de guerre avec lesquelles il s’était exhibé sur les réseaux sociaux. Condamné pour des violences conjugales et le tabassage d’un réfugié afghan, il est également mis en cause en 2019 et 2020 dans diverses descentes pour lesquelles il ne sera jamais inquiété. Un temps installé en Savoie avec Maxime P., il se rapproche enfin du groupe de « free-fight » « Swastiklan ». Revenu dans la capitale comtoise, Philippe T. attaque un entrepreneur franco-algérien le 1er février 2021 ; un délit dont le caractère raciste fut reconnu, lui valant deux ans de prison dont six mois avec sursis.

Image d’en-tête : Philippe T., prenant la pose, en 2017, sur le front du Donbass, fusil kalachnikov en main, drapeaux du « régiment Azov » et de la « Misanthropic Division » visibles en arrière-plan – capture d’écran.