Contre les sondages et les éditorialistes, le bloc des gauches (25,68%) s’est finalement imposé – en nombre de sièges [1] – devant la Macronie (23,15%) et l’extrême-droite (37,05%). Un résultat sur fond de participation record (66,63%), qu’il faut toutefois nuancer y compris en Franche-Comté. La région offre ainsi cinq député-e-s au « Rassemblement National » (trois en 2022), quatre à « les Républicains » (quatre en 2022), deux à « Ensemble » (quatre en 2022) et seulement une au « Nouveau Front Populaire » (deux en 2022).
Sur le secteur de Besançon, pas de surprises
La première circonscription du Doubs voit la réélection du MoDem Laurent Croizier, l’emportant (à 36,18%) face au RN Thomas Lutz (32,31%) et à la LFI-NFP Séverine Véziès (31,51%). Une issue attendue, si ce n’est concernant le score en baisse de cette dernière par rapport au premier tour. « La majorité présidentielle était en tête, les électeurs et électrices n’ont pas voulu prendre de risques dans cette triangulaire en optant pour un vote utile » relève-elle.
Pas davantage de bouleversements sur la deuxième circonscription du Doubs, l’EÉLV-NFP Dominique Voynet (59,95%) emportant son duel avec le RN Éric Fusis (40,05%). Elle a bénéficié d’une dynamique de campagne mais aussi d’un retrait assumé par le centriste Benoît Vuillemin, qui avait tenté de reprendre le flambeau d’Éric Alauzet. L’ancienne ministre est donc désormais la seule parlementaire comtoise de gauche, assemblée nationale et sénat confondus.
Laurent Croizier évincé du kursaal
Ces résultats ont été annoncés au kursaal de Besançon, où des centaines de personnes s’étaient massées pour accueillir Véziès et Voynet avec des slogans antifascistes. Croizier n’a pas bénéficié du même soutien populaire, arrivé vers 21h30 il n’a pu se contenter que d’un passage éclair émaillé de sifflets, huées et injures. Il n’en demeure pas moins satisfait du scrutin, considérant que « la population à fait ici un choix, celui du travail et du pragmatisme ».
Reste une extrême-droite qui n’a jamais été aussi haute, oscillant par exemple entre 23,92 et 28,25% des bulletins au cœur même de la cité de Victor Hugo. À la Préfecture aussi, les autorités retenaient donc leur souffle ; craignant des débordements, le secteur a été verrouillé et d’importants effectifs policiers dépêchés. Après l’explosion des atteintes racistes et antisémites, une pacification (provisoire) de la société serait-elle aujourd’hui envisageable ?
Dans le Jura, une résistance centre-droit
Dans le reste de la région, le suffrage a peu redessiné le paysage politique ; le LR-RN Matthieu Bloch (50,76%) est élu face au sortant « Ensemble » Nicolas Pacquot (49,24%), dans la troisième circonscription du Doubs ; la RN Géraldine Grangier (54,85%) conserve son mandat devant la PS-NFP Magali Duvernois (45,15%), sur la quatrième ; même chose quant à la LR Annie Genevard (62,69%) contre la RN Floriane Jeandenand (37,31%), dans la cinquième.
Côté Jura la macroniste Danielle Brulebois (56,85%) se maintient face à la RN Valérie Graby (43,15%), dans la première ; idem avec la LR Marie-Christine Dalloz (65,02%) devant le RN Thierry Mosca (34,98%), sur la seconde ; la LR Justine Gruet (56,19%) rempile elle aussi contre la RN Aurore Vuillemin-Plançon (43,81%), pour la troisième circonscription. Malgré des pourcentages élevés, le « Rassemblement National » n’obtient ainsi aucune victoire dans ce département.
Un nord très brun
Contrée lepéniste, la Haute-Saône s’était prononcée dès le 30 juin pour confirmer le RN Éric Salmon (50,11%) contre le PS-NFP Éric Houlley (22,53%) dans la deuxième ; le RN Antoine Villedieu (53,52%) vient également de reprendre son poste sur la première circonscription, dans une bataille l’opposant à « l’Ensemble » Alain Chrétien (46,48%). Le « Rassemblement National » confirme donc son ancrage, après des présidentielles chaque fois plus concluantes.
Ces législatives ont été plus disputées dans le Territoire de Belfort, même si l’élection du LR Ian Boucard (55,38%) était attendue face à la RN Carine Manck (44,62%) dans la première circonscription ; mais un coup de théâtre a failli se produire pour la deuxième, entre le RN Guillaume Bigot (50,59%) et le sortant LFI-NFP Florian Chauche (49,41%) que seulement 337 voix séparent alors que l’extrême-droite y avait été donnée favorite avec assurance.
[1] Note : les élections législatives n’étant pas remportées à la proportionnelle, les moyennes nationales obtenues par les différentes listes ne constituent qu’une donnée indicative ; d’autant plus concernant le second tour, car si le « Rassemblement National » est encore omniprésent sur tout le territoire ce n’est pas le cas de ses principaux concurrents du « Nouveau Front Populaire » et « d’Ensemble » qui dès lors cumulent des scores moindres. Alors qu’elle est arrivée première en pourcentage total des voix, la coalition d’extrême-droite n’est ainsi que la troisième force politique de l’assemblée en nombre d’élu-e-s. Pour donner un exemple, imaginons que le pays est divisé en cinq circonscriptions : sur la une, le RN est à 100 % et LFI à 0 % ; la deux RN 100 % LFI 0 % ; la trois RN 49,99 % LFI 51,01 % ; la quatre RN 49,99 % LFI 51,01 % ; la cinq RN 49,99 % LFI 51,01 % ; on obtient bien une moyenne globale de 69,994 % des voix totales pour le RN et 30,006 % pour LFI, mais en nombre de sièges la répartition est respectivement de deux pour le RN et de trois pour LFI qui s’impose donc.
Illustration : aperçu du kursaal à Besançon, où plusieurs centaines de personnes étaient présentes à l’annonce des résultats locaux et nationaux.