Ce lundi 9 septembre à l’aube, Gérald prend son service sur un site « Safran » de Besançon. Mais rapidement, il remarque de nombreux graffitis apparus sur la façade. « Free Palestine » et « non à la guerre » ont été notamment inscrits à la bombe, alors que l’entrée principale fut maculée de peinture rouge symbolisant le sang des populations suppliciées. Le message est explicite, les dégâts assez conséquents. Une plainte pénale a été déposée alors que trois suspect·e·s sont désormais recherché·e·s, mais la marque a décidé de s’abstenir de toute communication.
Si cette action semble constituer une première dans la capitale comtoise, elle s’inscrit en effet dans une opération bien plus large de contestation de la chaîne militaro-industrielle destinée à alimenter la guerre de « Tsahal ». Nanterre était à nouveau prise pour cible en parallèle, le siège de la société ayant déjà été redécoré de façon similaire dans la nuit du 7 au 8 décembre 2023. Mais, de la maison-mère animée de façon régulière en passant par nos proches voisin·e·s de Dijon le 11 mars dernier, les manifestations plus « posées » se sont également multipliées depuis le 7 octobre.
La multinationale est souvent décriée pour son ancrage notoire dans le domaine martial et sécuritaire, mais les massacres actuellement opérés en particulier à Gaza ont suscité un regain d’hostilité à son égard. Car « Safran » s’est étroitement associée avec la firme israélienne « Elbit », afin de concevoir des drones utilisés sur le front. Pour bien des militant·e·s partisan·e·s d’un cessez-le-feu, ce véritable marchand d’armes est donc lui aussi responsable de la situation humanitaire désastreuse et doit être « mis sous pression » jusqu’au retrait de toute collaboration en la matière.
Une extension de la campagne « Boycott, Désinvestissement et Sanction » (BDS), selon les principes de l’action directe. Comme nous le relations le 18 mai, cette volonté de pénaliser des enseignes partenaires a toujours été assumée à Besançon. Mais jusqu’ici la méthode est restée cantonnée à des pratiques « intellectuelles », avec un arrêt lors des cortèges afin d’informer la population. Objectifs de choix, les succursales de Carrefour et KFC sont souvent « visitées » de la sorte ; mais à part quelques autocollants sur les vitrines, aucune atteinte matérielle n’a encore été relevée.
Une affaire qui illustre donc l’extrême sensibilité du sujet, qui peut aussi dériver dans la paranoïa et la répression des pouvoirs publics. Lors de la grande mobilisation du 7 septembre, trois jeunes ont ainsi voulu remplacer un étendard états-unien par un drapeau palestinien afin de faire trôner ses couleurs sur l’hôtel de ville. La BAC intervient alors. Prenant peur, l’un des protagonistes tente de fuir avec la fameuse bannière étoilée ; l’intéressé est coffré et placé en garde-à-vue, convaincu d’un « vol en réunion » dont les suites judiciaires concrètes sont encore attendues…
Comme l’exposent nos divers clichés réalisés en février et mars 2024, le pavoisement de ce bâtiment est pourtant toléré et habituel. En plein essoufflement du mouvement « canal historique », la stratégie policière pourrait donc s’avérer contre-productive pour les autorités. Car si les rendez-vous du samedi sont aujourd’hui surtout marqués par une fréquentation modeste et des divisions internes, ce marasme est aussi propice à l’émergence d’initiatives plus autonomes et radicales. Ultime illustration, avec l’arrivée d’une toute nouvelle section « Urgence Palestine ».
Photographie d’en-tête : Image d’illustration – Aperçu du cortège « pour une paix immédiate et durable en Palestine », le 4 novembre 2023 à Besançon.