Arton3373 32301(1)

Alors que les accidents mortels de la route sont un fléau, le comportement négligeant ou délétère des automobilistes est souvent pointé du doigt. Il y a quelques jours sur une route du Haut-Doubs, c’est l’adjectif de criminel qui revient surtout. Un jeune homme, roulant à tombeau ouvert, avec une grosse cylindrée trafiquée, a fauché deux hommes, dont un a perdu la vie. Prochainement jugé pour homicide et blessures involontaires aggravées, le chauffard risque jusqu’à dix ans de prison. Mais derrière le fait-divers, se dessine un ancien cadre lepéniste fixé dans « une forme de toute-puissance » et déjà condamné à cinq reprises.

Au val d’Usiers dans le Haut-Doubs, le croisement entre la nationale 57 et la départementale 48 s’avère particulièrement sensible. À ce lieu-dit, les accrochages sont fréquents et parfois lourds. Ce fut encore le cas dans la journée du samedi 7 septembre, avec la collision entre une Dacia et une Audi RS6. Alors que deux personnes âgées s’engageaient tranquillement sur l’axe, ils ont en effet été littéralement fauchés par la berline d’un jeune homme arrivant à très vive allure. Si ce dernier s’en sort presque indemne, l’autre occupant de soixante-dix ans est décédé sur le coup et son passager de soixante-seize ans reste encore aujourd’hui dans un état grave.

Énième actualité, tragique mais banale ? Les incidents routiers ont secoué l’actualité locale dernièrement, à l’image des cinq piétons blessés par une femme de quatre-vingt-huit ans le 3 septembre à Montrapon. Mais dans ce dossier, le Procureur de la République Étienne Manteau a tenu à organiser une conférence de presse. Une décision singulière, qui se double de mots particulièrement fermes à l’égard du vingtenaire : « C’est un individu dans une forme de toute-puissance, qui n’obéit qu’à ses propres règles. Ce n’est pas la fatalité qui a entraîné la mort d’un homme au carrefour de la Vrine, mais l’attitude de ce conducteur » rapporte l’Est Républicain.

Activiste d’extrême-droite et profanateur de mosquées

Les témoins interrogé·e·s et les archives de vidéosurveillance laissent peu de place au doute, la vitesse démentielle n’ayant pu que conduire au drame. Aussi alors que le propriétaire n’avait pas procédé au changement des plaques minéralogiques, il s’était permis de procéder à des modifications prohibées sur son bolide acquis en Suède. « Le moteur a été débridé par un garagiste pour porter sa puissance à sept-cent chevaux » précise le magistrat, l’engin n’étant dès lors plus autorisé à circuler sur la voie publique. Le mis en cause a été incarcéré dans l’attente de son procès le 6 novembre, pour homicide et blessures involontaires avec deux circonstances aggravantes.

Ce travailleur frontalier de vingt-six ans n’est pas un inconnu dans le paysage militant, ayant été le responsable-adjoint de « Génération Nation » pour le Doubs et le candidat « Rassemblement National » aux cantonales de 2021 sur Pontarlier. Bien que condamné à trois reprises notamment pour des « violences conjugales », il avait ainsi pu gravir sans problèmes les échelons du parti d’extrême-droite. « Nous n’étions évidemment pas au courant de ce passif » assurera la référente Géraldine Grangier, depuis devenue députée. Même si à l’époque la « détention d’arme » s’était ajoutée à son passif, un délit commis à l’occasion d’un tractage aux couleurs bleu Marine.

S’étant sommairement rapproché de « Génération Zemmour », le politicien en herbe s’était surtout fait connaître par la dégradation de trois mosquées du 6 au 20 novembre 2022. Plusieurs lieux de cultes avaient été visés par des inscriptions à croix de Lorraine, sur Pontarlier, Montlebon et Besançon, symboles que l’auteur avait expliqué par sa volonté de « signifier que la France appartient aux Français ». Alors qu’un exemplaire de Mein Kempf était retrouvé chez lui en perquisition, le caractère discriminatoire avait été retenu portant la peine à dix-huit mois de prison avec sursis, cinq ans d’inéligibilité, ainsi que 20 000 euros de dommages et intérêts divers.

Image d’en-tête : Le principal protagoniste prenant part à un tractage pour Julien Odoul en 2021, au fond à droite (flouté par nos soins) ; à ses côtés divers responsables du « Rassemblement National » dans le Doubs, dont Jacques Riciardetti et Géraldine Grangier (non-flouté·e·s).

À lire aussi