L’autrice Blanche Sabbah était de passage hier soir à Besançon, l’occasion d’évoquer ses engagements féministes et écologistes à travers une thématique donnée. L’invitation s’inscrit ainsi dans le cadre du « Festisol », un festival des solidarités désormais international, initié il y a plus de trente ans dans la capitale comtoise. Sous l’égide de l’association « Peuples Solidaires Doubs », partenaire de l’évènement avec le café-librairie « l’Interstice », la jeune femme a en effet contribué à la parution d’un film-documentaire sur les bananeraies en Équateur. Un projet mené directement sur place auprès des populations concernées, en duo avec le rappeur Hippocampe Fou.
Un royaume de la banane, c’est ainsi qu’est décrit le premier pays exportateur du célèbre fruit exotique. Mais derrière cette industrie, des conditions de travail et de vie particulièrement difficiles pour ces centaines de milliers de personnes. Avec une exposition photo, reprise salle Proudhon, ainsi qu’un film, dont le premier épisode a été diffusé le 30 mai dernier, l’ONG « ActionAid France – Peuples Solidaires » a souhaité restituer la réalité de ces petites mains agricoles. Une activité harassante, sous-payée, où l’employeur et ses capos imposent leur toute-puissance, tableau encore plus sombre pour les femmes et minorités de genre soumises à une exploitation et une maltraitance accrues.
« L’objectif était de tendre le micro, pas de prendre la lumière. On a donc donné la parole à ces travailleurs et travailleuses incroyables, afin qu’ielles racontent leur quotidien. Il a fallu beaucoup de temps et de longs entretiens pour aboutir à ce résultat, car les protagonistes prenaient de gros risques – exclusion, menaces, disparitions… Derrière cette toile de fond, on a bien sûr mis un focus sur la question des femmes ; salaire divisé par deux, tâches domestiques s’ajoutant, violences sexistes et sexuelles omniprésentes, effets des pesticides y compris sur la maternité, jusqu’aux combats syndicalistes avec l’émergence d’une branche féminine autonome de l’ASTAC » a notamment expliqué Blanche Sabbah.
Une situation à laquelle l’artiste fut nécessairement sensible, étant par ailleurs connue pour ses œuvres tranchées en la matière. Entre des réseaux sociaux prolifiques et cinq bandes dessinées à succès, le public jeune et sexisé était présent et conquis. « Le champ universitaire ou intellectuel est très bien, mais je crois qu’il est nécessaire d’aller également chercher une vulgarisation exigeante du féminisme avec une approche plus pédagogique, satirique, pop-culture. Contrairement à ce que nous servent certain·e·s, on est pas obligé·e·s d’être oppressant·e·s pour aborder des sujets graves, y compris avec force et humour » insistait Blanche Sabbah, avant une séance de dédicaces à laquelle les fans se pressaient.