Ufr Slhs Universite De Franche Comte

Ce 2 décembre 2024, l’édition locale de « l’Est Républicain » consacrait un plein article à l’action féministe d’un étudiant. Sous le titre « il réclame 20 jours de congé menstruel à l’université », le journaliste Pierre Laurent relatait de façon inédite le combat d’un certain A.K. pour ses camarades. Mais immédiatement, cette interview laudative a soulevé une vague d’indignation. Car derrière la sympathique initiative, beaucoup dénoncent la récupération d’une cause par un profil discutable en même temps qu’un énième naufrage médiatique.


Un cas « d’usurpation », selon les syndicats
Au sein de l’UFR-SLHS de Besançon, rarement une chronique n’avait suscité un tel tollé. Par un communiqué du 6 décembre dernier, la totalité des syndicats [1] a exprimé son incompréhension et sa colère face à ce qui est qualifié « d’usurpation ». En effet, A.K., étudiant en histoire, n’a pas hésité à convoquer un organe de presse afin de mettre en lumière la pétition qu’il a lancée pour la reconnaissance de congés menstruels par l’université. Un coup d’éclat repris par « l’Est Républicain », livrant le portait élogieux de ce chevalier blanc. Sans réserve, ni questionnement.

Car, ainsi que l’expose un procès-verbal de la « CFVU » en date du 23 septembre 2024, il s’avère que la cause était initialement portée par Enora Vagnaux, élue « UNEF ». Avec une proposition qui « concerne également les hommes en changement de genre », prévoyant « un groupe de travail pluriel dans la perspective d’examiner les conditions de la mise en place de ce congé pour les usagers ». Adoptée à l’unanimité, la motion était sur le point de se traduire concrètement. Une réalité certes citée dans le papier litigieux, mais pour mieux en contester paternité et légitimité.


Une personnalité qui ne fait pas l’unanimité
Autre axe de mécontentement, le profil controversé de l’intéressé. Plusieurs témoins nous ont rapporté avoir essuyé de graves difficultés relationnelles et comportementales avec lui, jugées d’autant plus incompatibles avec son activisme naissant. Sous couvert d’anonymat « par crainte de représailles », une demi-douzaine de personnes nous ont relaté avoir observé selon elles des « attitudes et propos sexistes ostensibles et répétés » ainsi que « une inadaptabilité aux cadres collectifs, une recherche manifeste de reconnaissance, un fort penchant pour la manipulation ».

Fondateur de la « Bannière des Étudiant·e·s en Histoire de Vesontio » (BEHV), Maxime Conte en fut président jusqu’au 16 mai 2024. Il a côtoyé A.K., un temps secrétaire de la structure, mais lui non plus n’en garde pas que de bons souvenirs : « Sa conduite auprès de nos collègues sexisées était pointée du doigt, les conflits se multipliaient. On le soupçonne aussi d’avoir falsifié un mail au nom de l’association, une plainte a été déposée contre X pour faux. Il a donc été exclu, via une lettre formalisée le 2 avril 2024 ». Une empreinte sociale mitigée, qui n’entachera pas l’hagiographie.


Au « Crédit Mutuel », pas de mea-culpa
Pourquoi offrir une tribune à un illustre inconnu en négligeant les travaux pourtant notoires d’instances compétentes, sur quelles bases relayer un prétendu « soutien de certaines associations étudiantes » sans même en relever ne serait-ce qu’une seule, comment ne pas trouver gênant, en 2024, d’écarter encore les femmes et minorités de genre d’un combat qui les concerne en premier lieu, en livrant un récit narré et traité exclusivement sous un regard novice et masculin ? Du côté de « l’Est Républicain », nous n’aurons jamais la moindre réponse à ces interrogations cruciales.

Sous ses traits d’objectivité, la propriété du « Crédit Mutuel » n’est pas toujours si « apolitique » qu’elle l’avance. Le rédacteur, Pierre Laurent, étant souvent prolixe en la matière, de pamphlets anti-Mélenchon en correspondance de guerre le 13 mars 2023 où « A cerclé » et « écriture inclusive » étaient dépeints en horreur. En soulevant la crainte d’un procès en « réappropriation sexuelle/culturelle », le gratte-papier ne pensait pas viser si juste… Contre lui-même. « Relou » dixit un billet du 8 décembre, avec pour nous un double carton rouge en « mansplaining ».

Boîte noire
Sollicité par texto à partir du 3 décembre à 20h01, A.K. a indiqué que « [il] ne donnerai[t] pas une suite favorable à [notre] demande » ; Quant à Pierre Laurent et « l’Est Républicain » contactés par voie électronique le 7 décembre à 18h50, il n’y aura pas de réaction. Via un article du 10 décembre intitulé « demande de congé menstruel à l’université : les précisions du syndicat étudiant Unef », le quotidien se contentera seulement de répliquer en partie le communiqué intersyndical en concluant sur la position de A.K., estimant que son action relevait d’un « soutien à la commission ».

[1] Il s’agit de : « l’Union Nationale des Étudiant·e·s de France » (UNEF), du « Bureau des Associations Franc-comtoises/Fédération des Associations Générales Étudiantes (BAF/FAGE), de la « Confédération Générale du Travail – Salarié·e·s/Étudiant·e·s » (CGT-SÉ), ainsi que de « Solidaires Étudiant·e·s ». À noter que « l’Alternative Étudiante Bisontine/Union Étudiante » (AEB/UÉ) est en voie de dissolution, quand l’extrême-droite, que ce soit « l’Union Nationale Inter-Universitaire » (UNI) ou « la Cocarde Étudiante », ne disposent ni de postes, ni de représentation ou de présence.



Illustration d’en-tête : Aperçu de l’UFR-SLHS Megevand, en 2014 – Ludovic Godard/cc-by-sa-4.0.

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