Depuis le début de la semaine, l’Institut Supérieur des Beaux-Arts est animé… étudiant·es, enseignant·es et soutiens s’élèvent contre la réintégration d’un assistant, mis en cause pour des violences sexistes et sexuelles. La décision avait été récemment actée par la direction, mettant le feu aux poudres. En parallèle un autre professeur vient également d’être suspendu, au motif de « comportements inappropriés. » Cours en partie ajournés, tractage et affichage massifs, sit-in avec occupation du site, réunions et assemblées générales, révèlent une situation explosive.
Selon nos informations, un professeur vient tout juste d’être suspendu. Il lui est en effet reproché des « comportements inappropriés » lors d’une résidence, en l’occurrence à l’occasion d’une fête à son domicile. L’enquête administrative et pénale étant en cours, aucune réaction officielle ne nous a été communiquée sur ce volet. Mais la nouvelle ne surprend guère les étudiant·es, pour qui d’autres noms sont bien susceptibles d’apparaître. « En réalité, il reste pas mal de ménage à faire. Les choses remontent petit à petit, des têtes peuvent encore tomber » nous confirme t-on.
L’actualité tombe à un moment de fortes tensions, ravivant des plaies anciennes mais toujours vives. L’affaire initiale remonte au 22 septembre 2020, lorsque des élèves avaient dénoncé harcèlement, agressions et viols de la part de membres du personnel. Si le parquet n’avait finalement pas poursuivi le dossier, la ville de Besançon s’était appuyée sur l’audition d’une soixantaine de témoins pour prendre des sanctions. Laurent Devèze, directeur depuis 2009, s’était ainsi vu limogé dès le 8 avril 2021, considérant les charges « concordantes, répétées, et graves » à son encontre.
Trois ans après ce séisme, le retour d’un incriminé à ses fonctions ne passe pas. Celui-ci avait fait l’objet d’une plainte, retirée par la victime ; mais ainsi que le souligne « balance ton école d’art » qui a publié son récit, cette rétractation judiciaire n’enlève rien à la matérialité des faits allégués. Une cinquantaine de protestataires réclame ainsi qu’une solution viable soit trouvée, laquelle devrait privilégier la préservation des personnes et la sérénité de l’ISBA. Une demande discutée hier en Conseil d’Administration, alors que le fonctionnaire concerné a été placé en arrêt de travail.
« L’intéressé avait été mis en disponibilité pendant toute la période, certain·es estimeront que du temps est passé et que les dissensions sont désormais moins importantes. Mais nous nous n’oublions pas, ce n’est pas possible de le voir revenir comme si de rien n’était. Alors nous nous re-mobilisons, jusqu’à être pleinement entendu·es ! Un encadrant ciblé pour de tels méfaits n’a plus sa place ici, il faut que maintenant ce soit un principe automatique pour tout le monde. Autrement, notre colère ne pourra qu’être grandissante et durable » explique ainsi une participante.
« En tant que Directeur, je me dois d’appliquer le droit. »
Sollicité par nos soins, le directeur Mathieu Ducoudray tient à préciser sa position concernant le cas de l’assistant. « Dans cette affaire comme de manière générale, ma boussole reste l’état de droit. J’entends la contestation, mais ma responsabilité est de faire appliquer et respecter un cadre légal et républicain. Il s’avère qu’aujourd’hui je n’ai aucun élément qui me permette de formuler le moindre reproche à cet assistant, ainsi dès lors qu’il est amené à reprendre ses fonctions il m’appartient seulement de veiller à ce que cela se fasse dans les meilleures conditions. »
La situation reste néanmoins complexe, peu d’issues alternatives pouvant s’imposer dans ce dossier. Il concède ainsi une mobilisation importante, avec au moins un quart des effectifs étudiants et la moitié du corps encadrant engagé. « C’est une partie de l’ISBA, certes significative. Mais d’autres élèves et professeurs ont un avis différent, qu’il convient peut-être aussi d’écouter. Nous veillons à ne rien laisser passer en terme de VSS, ce qui n’exclut pas de poser les choses. Il ne s’agit donc pas de minorer ou ignorer ce qu’il se passe, mais d’amener à un dialogue constructif. »
Photographies : Toufik-de-Planoise