Manif' Féministe 07 03 2020 Besançon

Avec près de cinq cents participant·e·s dans la capitale comtoise, la mobilisation relative à la « journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et minorités de genre » a été plutôt bien suivie. Si un consensus local est désormais entendu autour de cette cause, restent des divergences perceptibles quant à l’organisation. Au-delà du bitume, la plupart des collectifs, surtout jeunes et intersectionnels, s’avèrent ainsi frappés d’un ostracisme persistant, quand les associations institutionnelles s’arrogent encore largement le haut du pavé. Date revendicative et politique, ou pragmatisme mondain ? En essayant de continuellement ménager la chèvre et le chou, le numéro d’équilibriste pourrait finir par vaciller.


Notables partout, intersectionnalité nulle part
Si à Besançon la manifestation du 23 novembre a été un succès, c’est grâce à la synergie de différentes organisations locales. Mais en tête de cortège, on retrouvait surtout nombre de collectifs désignés comme radicaux, intersectionnels et de terrain : « Nous Toustes », « Groupe d’Actions Féministes » (GAF), « Intransigeance », « Trans’Comté », ou encore « Partage, Droit, Autonomie » (PDA). Une prééminence militante évidente, mais qui se heurte encore aux freins institutionnels. Car dans les faits, ces structures, alors qu’elles brassent un public large, rythmant et colorant la marche, abondant en discours percutants, enjoignant à entendre les revendications LGBT+ ou TDS autrement absentes, restent invisibles des programmes officiels et médias de préfecture.

Une participation indispensable pour qu’une sociologie jeune et plurielle fasse jour lors du principal évènement de la période, qu’il faut cependant dissimuler. Invisibles aux yeux du monde, mais aussi, surtout, auprès de partenaires, autant pratiques que financiers, qui ne veulent pas trop brusquer les choses, quitte à multiplier les contradictions. Dans le département du Doubs, on retrouve, en sponsors, la Ville de Besançon, connue pour ses positions hostiles aux travailleurs et travailleuses du sexe, le conseil général, malgré une gestion des MNA et de l’ASE qui pourrait être discutée, la préfecture, dont l’ancien locataire fut critiqué dans un dossier sensible puis accusé de harcèlement, jusqu’à la police locale, lourdement épinglée quant à sa considération des VSS.

Pancarte Féministe 06 03 2021 Besançon
Pancarte visible lors de la manifestation du 6 mars 2021 à Besançon, exposant « pas de féminisme sans les putes ».


Une journée bénie par les cieux ?
La liste ne s’arrête pas là, prenant même des tournures assez surprenantes. On distingue ainsi le « mouvement du Nid », officine abolitionniste fondée par le père André-Marie Talvas et qui trouve domicile sous les auspices du diocèse à l’église Saint-Maurice. Mais surtout « SOS Futures Mamans » sur Pontarlier, trônant entre la maison de santé Simone Veil et le CIDFF. Le 9 août dernier, nous consacrions un dossier à cette antenne. Car si elle apporte une aide certes louable aux parents en difficultés, elle s’avère également proche des instances catholiquesAinsi que de ses dogmes, en particulier concernant l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG). En comparant apports et traitements entre le bloc alternatif et régalien, difficile de ne pas y voir une curieuse différenciation.

Comme le reconnaissent elleux-mêmes les activistes les plus progressistes rencontré·e·s, la marge d’évolution a cependant été fulgurante ces dernières années. Après de premières interrogations en novembre 2021 et un véritable clash en mars 2023, les féministes soixante-huitard·e·s, blanc·he·s et bourgeois·e·s se sont fait·es une raison. « Il y a encore trois-quatre ans, certain·e·s n’hésitaient pas à nous menacer d’une exclusion par la force à cause de pancartes anti-TERF/SWERF, aujourd’hui les choses se sont inversées. Le gratin a bien compris que les moins de soixante ans se mobiliseraient, avec ou sans lui. Un compromis a été trouvé dans la rue, mais il reste beaucoup de chemin afin qu’on soit toutes et tous pleinement considéré·e·s » constate notamment Babouche, sympathisante de PDA.


Illustration d’en-tête : Aperçu d’un cortège pour la « journée internationale des droits des femmes et minorités de genre », le 7 mars 2020 à Besançon. Au centre, une participante brandit une pancarte « la Révolution sera féministe et intersectionnelle ».

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